Parmi la multitude de visions
possibles pour notre Église, de portes possibles pour entrer dans le
flot de la mission de Dieu, il nous faut faire un choix. Chaque niveau
de la vie de l’Église fait des choix. Le Conseil œcuménique des Églises
et la conférence des Églises européennes ont choisi de s’engager dans un
pèlerinage de justice et de paix, avec de multiples entrées et de
multiples thèmes, qui vont de l’aide d’urgence et du développement au
dialogue œcuménique et aux conversations interreligieuses. L’Église
protestante unie a choisi de renouveler son témoignage, d’avoir pour
vision d’être « une Église de témoins ».
Notre vision, c’est ce à quoi
nous sommes appelés, de là où nous en sommes dans notre cheminement. Il
ne s’agit pas de se fixer des objectifs trop hauts qui nous
décourageraient. Mais il s’agit de discerner les dons, les personnes,
les forces que nous donne Dieu, aujourd’hui et maintenant, et de discerner ensemble ce que Dieu veut en faire. Les forces
que nous donne ce Dieu dont la puissance s’accomplit dans la faiblesse !
Car dans notre cheminement, nous ne partons pas vierges et isolés. Dieu
nous a donné au moins deux choses : d’abord nos communautés, nous et
ceux qui nous entourent. Même si nous ne sommes plus que 10, même si
nous sommes fatigués de porter une paroisse à bouts de bras, il y a là
une valeur incroyable que Dieu peut exploiter… mais peut-être qu’il
attend de nous que nous fassions autre chose…
Quelque chose que nous
avons vraiment envie de faire, quelque chose qui nous donne de la joie
et nous aide à devenir témoins de la joie de l’évangile, et pas « ce
qu’il faut faire parce qu’on a toujours fait comme ça ». Peut-être qu’un
groupe de 10 personnes qui se réunit dans le salon d’un de ses membres
et qui offre du temps, de la convivialité et des gâteaux dans la rue ou
dans une maison de quartier une fois par mois témoigne plus qu’un groupe
de 10 personnes qui se bat pour empêcher son temple de s’effondrer… et
peut-être que d’autres croyants qui ont fui la responsabilité trop
lourde de porter une institution seraient ravis de témoigner de ce que
Dieu change dans leur vie, si seulement on les aider à mettre des mots
sur cette expérience si intime…
La deuxième chose que Dieu nous
donne, c’est un contexte. On ne chemine jamais dans un lieu neutre et
vide. Il y a tous ceux qui nous entourent, qui croisent notre route, qui
parfois même la partagent, et que l’on ne prend pas toujours le temps
d’écouter. Beaucoup d’entre eux ont soif de la source à laquelle nous
nous abreuvons, mais on peur de s’y noyer ou d’entre rester captifs. Ils
ont peur parce qu’ils ne savent pas. Avec eux aussi, peut se faire un
cheminement, dans la rencontre, avec du temps, dans la proposition
humble et le témoignage personnel et respectueux. Le contexte, c’est aussi la culture et la mentalité, le contexte médiatique, etc. Ce sont aussi des lieux pour témoigner qu’une autre vision du monde est possible, confiante malgré les attentats, qui espère au-delà de la peur, qui croit au-delà du doute et du marasme ambiant.
Nous le voyons, il
y a de multiples visions possibles, mais il y a aussi les dons que nous
avons, ici et maintenant, et les désirs que Dieu nous met au cœur, qui
permettent de limiter ces possibles, de discerner
une vision pour l'Église, chacun à son niveau.
Les personnes, les dons, le contexte, la vision : tout cela tient la
communauté ensemble, l’aide à cheminer dans la même direction, nous aide
à être une Eglise en marche. Mais la route n’est pas toujours droite,
nous le savons dans nos vies, et le cheminement de Jésus dans les
Evangiles nous le montre aussi. Aussi faut-il régulièrement reprendre la
vision, corriger la direction, parce que les aléas de la vie ou le
chemin nous font faire des détours, et parfois nous engager dans une
fausse direction.
St Jacques... La mecque, film de Coline Serreau |
Sur notre route, dans notre cheminement, il nous
faut aussi parfois nous alléger de ce qui nous pèse inutilement, de ce
que l’on se fatigue à porter, parce que cela nous rassure. Je ne sais
pas si vous avez déjà vu le film « St Jacques-La Mecque », où un groupe
part en pèlerinage sur le chemin de Compostelle. A la première montée,
plusieurs d’entre eux se cachent dans les fourrés pour se débarrasser de
produits de beauté et autres éléments qu’ils avaient mis dans leur sac,
pensant que cela leur serait utile, mais qui se révèlent vite superflus
face à la nécessité de voyager léger. En Église aussi, il est
nécessaire de voyager léger. D’abord, c’est une question de survie, une
nécessité biologique, si l’on veut arriver à continuer d’avancer ;
ensuite, toute l’attention, toute la force que nous consacrons à nos
affaires, nous ne la consacrons pas à ceux qui nous entourent ; enfin,
cela est nécessaire pour arriver à aller loin sans s’épuiser.
Nous avons
toujours la possibilité de nous passer de tel ou tel élément qui a été
bien utile à un moment donné, mais qui ne l’est plus. Dans notre
cheminement, nous avons besoin régulièrement de voir ce qui nous est
utile, ce qui nous fait avancer, et ce qui nous pèse, nous freine, nous
détourne de notre vision. Si l’on est attentif, si les fruits de
l’Esprit nous travaillent, on s’aperçoit vite que ce n’est jamais le
frère ou la sœur qui nous ralentit, mais cela peut être quelque chose de
trop lourd à porter, pour lui ou pour moi… Nous sommes appelés à "Aller",
à rencontrer « les nations », c’est-à-dire à vivre l’interculturel, à
témoigner, à baptiser, à faire des disciples, des gens qui se mettront
eux-mêmes en marche… des gens qui à leur tour, marcheront à nos côtés, à
la suite de celui qui est avec nous tous les jours jusqu’à
l’accomplissement des temps.
Claire Sixt Gateuille
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