jeudi 28 août 2014

Alors, c’est comment un synode vaudois ?



Casa valdese di Torre Pellice (c) CSG

Ben, en gros, ça ressemble à un synode de l’EPUdF (mon Eglise) qui aurait fusionné avec un conseil d’administration de la taille de la fondation des diaconesses, voire celle de J. Bost… Bref, beaucoup d’administratif, pas mal de questions pratiques qui soulèvent souvent des questions théologiques, des discussions de couloir, quelques négociations parallèles, des revendications et des remerciements, des interventions plus ou moins à-propos, plus ou moins polémiques et, le meilleur, des retrouvailles entre vieux amis ou collègues complices. Et autour, des stands, des cabines de traducteurs (le synode est traduit en français, allemand et anglais !), des bureaux, une véritable petite ruche qui envahit Torre Pellice une fois par an.

la modérature du synode
Je suis donc arrivée lundi soir, peu avant manger. Après le repas, j’ai assisté à une soirée-conférence au temple autour des droits de l’homme, avec quatre intervenants : deux politiques et deux membres de la société civile, dont deux étaient engagés dans l’Église et/ou la diaconie). Le sénateur, qui a mentionné avoir une « histoire commune » avec l’Église vaudoise, a parlé de la dimension « sacrée » de la personne, désignant ainsi le fait qu’elle est plus « grande » que ce qu’elle peut faire de mal, qu’elle a une dignité inconditionnelle, qu’elle garde toujours ses droits fondamentaux. Même si cet appel au « sacré » pour évoquer les droits humains ne m’a pas convaincue (en bonne réformée, je crois que seul Dieu est sacré), il m’a touché par son évocation de trois situations de migrants à Lampedusa, qu’il a comparés à trois tableaux de la passion du Christ, dont le Christ mort de Mantegna comme image des personnes mortes noyées.

Mardi, les débats ont porté sur :
- La langue utilisée pour le culte. Un vœu invitant à ce que, en tenant compte des situations locales, toutes les Eglises « concernées par le phénomène migratoire » cheminent vers l’utilisation de l’italien comme langue commune du culte. Le vœu a été reformulé pour que l’accent soit mis sur l’unité de la communauté dans le culte, et non pas l’unité linguistique.
Le mur de la presse (c) CSG
- L’hebdomadaire Riforma, ses problèmes budgétaires, mais aussi sa stratégie de développement. Riforma a lancé un projet : « Riforma si fa in 4 » (Riforma se met en quatre) : l’hebdomadaire papier, une newsletter électronique quotidienne pour le compléter, un site internet enrichi plusieurs fois par jour et un mensuel gratuit distribué dans les vallées vaudoises. A propos de presse, il est drôle de voir l'importance qu'a pour le synode les échos qui en sont fait dans les journaux régionaux et nationaux (un tableau affiche les articles !)
- La maison d’édition Claudiana et son réseau de librairies
- D’autres œuvres, leurs projets, leur dynamisme ou leurs déficits (forcément, en synode, on en parle surtout quand ça va plutôt mal).
- La violence faite aux femmes
- La formation, surtout celle des pasteurs et des diacres (il y a 14 diacres reconnus dans l’Église vaudoise). On voit qu’ici aussi, le pasteur devrait être formé à tout, de la musique à la jeunesse en passant par tous les domaines théologiques et toutes les sciences humaines…  Car il est bien connu que le pasteur doit répondre à toutes les attentes !

Le point sur la jeunesse a été reporté, faute de temps. Il faut dire qu’ici, tant que des personnes veulent parler, le débat n’est pas clos et on ne peut ni proposer de voter, ni passer au sujet suivant…
Mercredi, il a été encore beaucoup question de diaconie. Mais le synode a aussi parlé de la place et de la valorisation de la culture méthodiste à l’intérieur de l’Eglise vaudoise.

Mais comme le synode ne se limite pas aux plénières, j’ai été interviewée mardi midi par un journaliste de Réforme et la personne qui s’occupe, entre autres, des relations internationales pour la « Table vaudoise » (la Table vaudoise est une équipe de 7 personnes qui forment l’équivalent de notre conseil national, mais sont élus chaque année. Une équipe de permanents travaillent aussi pour elle, l’équivalent de notre équipe nationale). Ceux qui comprennent l’italien peuvent le lire sur le site de l’Église vaudoise.

Corinne Lanoir et Yann Redalié (c) CSG
Mardi soir, les invités ont eu droit à une réception dans un restaurant typique de Bobbio Pellice. J’étais assise avec Yann Redalié, professeur de nouveau Testament à Rome, Corinne Lanoir (professeure d’ancien Testament à Paris) et Célestin Kiki, secrétaire général de la Cevaa. Nous avons eu des discussions très intéressantes, en particulier sur les cultures africaines. Nous avons ainsi parlé du veuvage et de la pratique du lévirat que les Églises ont souvent combattu (dans le lévirat, la femme doit épouser un des frères de son défunt mari, comme Ruth). Nous avons aussi parlé des esprits et de la dimension psychologique de la délivrance, ainsi que de la dimension spirituelle de la guérison, de libération, de la résurrection (qui reste quelque chose qui questionne toutes les cultures).

Mercredi midi, j’ai encore eu le plaisir de déjeuner avec un collègue de promotion en théologie, Enrico Benedetto, qui est aujourd’hui professeur de théologie pratique à Rome. Et hier soir, j’ai eu la joie de prendre un peu de temps en soirée pour partager avec mon ami Michel Charbonnier, collègue à Bologne que j’ai connu grâce au conseil œcuménique des jeunes en Europe (EYCE) et au COE et de revoir sa femme Alessia lors des pauses du synode.

Bref, mon séjour ici aura été court (je pars aujourd’hui) mais intéressant et riche de rencontres.

Claire Sixt Gateuille

mercredi 27 août 2014

Du voyage comme thérapie contre les préjugés



"Le monde est ma paroisse"

Je suis en Italie, à Torre Pellice, depuis lundi, pour représenter l’Église protestante unie de France (EPUdF) au synode de l’Église vaudoise d’Italie (CVI). Si on n’arrive pas le jour où le synode commence (auquel cas on a droit à un accueil à l’aéroport), le trajet entre Turin et Torre Pellice est un peu long (un bus, puis un train puis un autre bus). On est récompensé par l’accueil et la joie de retrouver des amis. Un trajet aussi long donne l’occasion d’apprendre de la vie quelques leçons : 

Préjugé N°1 : il fait forcément plus chaud au Sud qu’au Nord
En arrivant à Turin, je m’aperçois qu’il va falloir que je me décide une fois pour toutes à intégrer que la météo est plus une affaire d’anticyclones et des dépressions que de latitude… heureusement, j’avais prévu un retour à Paris un peu frisquet, je suis heureuse d’avoir dans mes bagages un pull et une veste. Le ciel gris et bas et le vent froid ne se lèveront que mercredi matin, pour me permettre de découvrir « l’Israël des Alpes » (surnom donné à la vallée) sous le soleil.

fresque de la salle du Synode à Torre Pellice (c) CSG
Préjugé N°2 : l’écriture intuitive des outils informatiques a forcément la bonne intuition
En arrivant à Pinerolo, ville de destination de mon train, je descends à « Pinerolo Olympica », comme l’écriture intuitive du distributeur de billets de train me l’avait proposé. Je vois alors le train repartir, alors que je pensais être au terminus… mais non, il y a aussi la gare de Pinerolo, celle du centre-ville, celle à laquelle je devais descendre ! Heureusement, le trajet se fait à pied en un quart d’heure, mais je suis bonne pour prendre le bus suivant.
Préjugé N°3 : mon niveau en Italien est proche de nul
Bon, en fait, j’arrive à me repérer dans l’aéroport, les gares, les stations de bus. A répondre aux questions simples et à parler assez pour commander ou acheter quelque chose. Je découvre aussi durant la première journée de synode à laquelle j’assiste que j’arrive à suivre les débats, à comprendre au moins le sujet, presque toujours la tonalité de l’intervention, et même plutôt bien les arguments même si je ne saisis pas toutes les subtilités. Et dire que j’ai pratiqué l’italien 4 fois en 18 ans… 

Claire Sixt Gateuille