vendredi 25 avril 2014

De l'anecdote à la preuve



L’Église d’Angleterre (anglicane) a commandé à l’Institut d’études économiques et sociales de l’université d’Essex une étude, menée sur 18 mois et 1700 Églises locales, sur la croissance numérique des paroisses. Le but était de dégager les facteurs qui jouent sur la croissance ou le déclin numérique des Églises locales. Voici quelques pistes tirées du rapport que l’on peut trouver (en anglais) ici

L’introduction précise que l’Église cherche à croitre dans trois dimensions :
-          La sanctification, la transformation et l’engagement de ses membres (croissance en profondeur), au niveau individuel et communautaire
-          L’augmentation du nombre de disciples de Jésus-Christ (croissance numérique)
-          Les fruits de l’engagement des chrétiens en termes de justice sociale et de transformation de la société

L’étude commence par souligner qu’il n’y a pas de recette simple pour amener une communauté à la croissance. Mais elle détermine un certain nombre de facteurs qui jouent un rôle pour favoriser la croissance :
-          Un bon mode de direction d'Église (good leadership)
-          Avoir une mission et des objectifs clairs, donc un projet de vie
-          La volonté de se remettre en question, de changer, de s’adapter au contexte
-          L’implication des membres dans les activités et la direction de l’Église
-          Le choix assumé de faire de la croissance une priorité
-          Le choix assumé d’un style liturgique 
-          Le choix assumé de former des disciples (des gens qui s’engagent à suivre Jésus concrètement)

Bien sûr, le contexte de l’Église locale influe aussi ; globalement, la croissance est plus aisée dans les zones où l’on trouve des jeunes, les zones urbaines, les Églises accueillant des migrants.
Parmi les qualités du pasteur, on trouve : savoir motiver, avoir la capacité à élaborer une vision, savoir innover. Parmi les qualités de l’Église locale, on trouver le changement régulier des personnes en situation de responsabilité, l’élaboration d’une vision commune discernée et portée par la prière, les activités jeunesse (enfants et ados), l’ouverture vers ceux qui ne fréquentent pas l’Église, l’accueil et l’accompagnement des personnes de passage.

La deuxième partie de la synthèse présente, avec études de cas à l’appui, quatre profils de paroisse dans lesquels on peut trouver de la croissance :

  1. Paroisse classique. L’exemple étudié présente un village comprenant des familles, faisant partie d’un regroupement de paroisses desservi par un seul pasteur où un ministère centré sur cette communauté et sur les activités familles a amené une forte croissance. 
  2. Les nouvelles formes d’Églises. L’étude montre que dans les « fresh expressions of Church » en moyenne, pour 1 personne impliquée, 2,6 autres ont rejoint l’Église. Les 4 piliers de ces nouvelles formes sont la mission, l’ancrage contextuel, la formation à la vie de disciple et le caractère ecclésial. Il est à noter qu’après 3 ans d’existence, 66% d’entre elles continuent à croitre, 25% ont stabilisé leur nombre de membres, 9% ont une fréquentation très fluctuante et 10% ont disparu. La moitié d’entre elles sont dirigées par des laïcs et 40 % de façon bénévole. 
  3. Les implantations d’Église. il en existe différentes formes, qui partagent les même caractéristiques : l’importance de l’accueil, l’importance de l’implication des membres d’Église, la présence de petits groupes, l’engagement auprès des jeunes familles et le ministère de « guérison ». La reconnaissance et le soutien de leur diocèse est un élément important. 
  4. Les cathédrales et collégiales. c’est le lieu où l’on trouve la croissance la plus importante, surtout en termes de fréquentation. Leurs atouts sont l’accessibilité avec des lieux ouverts, attractifs pour les personnes en recherche (la première motivation mentionnée est l’atmosphère de paix et de contemplation), ainsi que la qualité des célébrations et le sens de la communauté fraternelle. Ces Églises ont également une dimension publique particulière. 


La dernière partie mentionne les éléments favorisant le déclin (à moins qu’ils n’en soient les signes) :
-          L’absence d’enfants dans l’Église et l’absence d’animation qui leur soit destinée
-          Les effets négatifs des regroupements de paroisse.
-          L’absence de travail pour discerner des vocations (ministères locaux et ordonnés).
-        Et de façon moins prononcée, les locaux inadaptés qui « sont un fardeau », les ministres qui ne savent pas déléguer, les membres qui refusent de s’impliquer dans la vie de l’Église, l’absence de choix stratégiques qui entraine une « stagnation ».

A chaque page du résumé de synthèse des résultats de l’étude, une phrase rythme chaque page : « Moi j’ai planté, Apollos a arrosé, mais c’est Dieu qui a fait pousser » (1 Co 3.6). Cette étude peut nous donner des pistes et nous éviter des pièges, à l’heure où l’Église protestante unie de France s’essaie à l’implantation d’Église.  

S’il y a une chose que je ressens à la lecture de cette étude, c’est le sentiment que notre Église cherche à « garder le contrôle » dans les projets d’évangélisation. Cela me semble logique en ces débuts hésitants. J’espère juste que nous ne pratiquons pas seulement le discernement en écartant des projets trop peu fidèles à notre conception de l’Évangile, mais que nous le pratiquons aussi en encourageant des gens qui auraient un potentiel, des idées ou le désir de trouver de nouvelles façons de partager l’évangile. Même si cela bouscule les cadres habituels…
 Claire Sixt Gateuille

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