mardi 5 août 2014

Tirer de son trésor du neuf et du vieux

Strasbourg - passage couvert du barrage Vauban (c) CSG
"Un maître de la loi qui devient disciple du Royaume des cieux, voici à qui il ressemble : il est comme un maître de maison qui tire de son trésor des choses nouvelles et des choses anciennes" (Mt 13.52, traduction Parole de Vie)

Les paraboles du Royaume, chez l'évangéliste Matthieu (chapitre 13), m'inspirent plusieurs remarques : 
- le Royaume des cieux est un investissement. Qu'il soit comparé à une culture, à de la levure, à des biens précieux ou à un filet, il ne peut développer sa valeur que si on le travaille, le met en valeur, si on s'y investit. Ce n'est pas une réalité évidente, c'est une réalité qui se donne à découvrir avec du temps et de l'investissement personnel.

- Le Royaume des cieux nous invite à nous projeter dans l'avenir. Matthieu utilise pour cela le langage apocalyptique de son siècle, de sa culture, de la communauté dans laquelle il témoigne de Jésus-Christ. Nous, français, utilisons plutôt le langage du projet. Les anglais utilisent quant à eux beaucoup le langage de la vision. En Église, nous utilisons aussi un autre vocabulaire, celui du discernement. Bref, notre foi est en tension entre le "déjà là" et le "pas encore", entre la promesse qui nous permet de nous "habiller le cœur" comme le renard du petit prince, nous met en mouvement, nous permet de dépasser les fatalismes, et l'inconnu qu'est l'avenir, qui requiert de faire totalement confiance à Dieu. 

- le Royaume des cieux nous appelle à être créatifs. Se projeter dans l'avenir, même pour nos projet d'Eglise, implique de se poser la question : quelle Église souhaitons-nous dans l’avenir ? Autrement dit, souhaitons-nous maintenir toujours la même Église, avec des chrétiens qui nous ressemblent ? Ou souhaitons-nous que l'Évangile touche des cœurs et transforme des vies, les vies des gens « réels » et pas des gens rêvés ? Souhaitons-nous maintenir l’Église comme une institution figée ou souhaitons-nous que l’Évangile s’incarne parmi nos contemporains et ceux qui viendront ensuite ? 

Autrement dit avec le vocabulaire de Matthieu : comment tirer de notre trésor des choses anciennes et des choses nouvelles ? C'est la question centrale de toute démarche d'évangélisation. Comment écouter vraiment la personne ou le groupe que j'ai en face de moi, prendre au sérieux la/les culture(s) dans lesquels cette personne baigne, et y annoncer l’Évangile jusqu'à ce que celui-ci prenne racine dans la/les culture(s) véhiculée(s) par son milieu, l'interpelle et crée là de nouvelles formes d'Église ? Cette démarche s'appelle la contextualisation. On en parle depuis longtemps pour la mission outremer, mais il serait temps de la pratiquer chez nous aussi... 

Écouter vraiment, sérieusement les cultures actuelles et ne pas les rejeter à priori. C'est ce qu'essaient de faire les pionniers engagés dans les fresh expressions. Il pratiquent la double écoute : celle de la Parole de Dieu et celle des cultures et sous-culture contemporaines. Ce qu'ils font n'est pas toujours révolutionnaire, ils remettent parfois simplement des trésors de spiritualité au gout du jour (comme les nouvelles fraternités monastiques). D'autres fois, ils créent des choses totalement nouvelles. 

Que ces initiatives nous stimulent et que l'Esprit saint nous inspire. Pour tirer de notre trésor du vieux et du neuf. 

Claire Sixt Gateuille
 

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