mardi 12 août 2014

Etre réformé, c'est être oecuménique ?

Je viens de finir de lire Beyond Confessionalism, un recueil de 4 articles d'Odair Pedroso Mateus, actuellement au service de la commission Foi et Constitution du COE, mais précédemment responsable du département "théologie et œcuménisme" à l'Alliance réformée mondiale. Le dernier article, dont le titre a été repris pour nommer le recueil, est une bonne synthèse de l'ouvrage, et si vous lisez l'anglais et êtes intéressés par la vision œcuménique des réformés au niveau mondial, cela faut la peine de lire ces 30 pages.

Pour rappel, l'Alliance réformée mondiale (ARM, World Alliance of Reformed Churches, WARC en anglais) a fusionné en 2010 avec le conseil des Églises réformées (formé d’Églises plus conservatrices) pour devenir la Communion mondiale des Églises réformées (CMER, World communion of Reformed Churches, WCRC en anglais). Mais tous les articles du livre datent d'avant cette fusion.

Beyond Confessionalism: the Specificity and Challenge of reformed Ecumenicity affirme que la spécificité de l'ARM, en plus de rassembler les Eglises réformées, est d'avoir eu dès le départ une auto-compréhension œcuménique, affirmant que son but était double : être un outil pour mener ses membres à plus d’œcuménisme et qu'elle était donc appelée à diminuer à mesure que l'unité des chrétiens se développerait, et promouvoir la mission. le mariage de ces deux convictions amènera entre autres dans les années 50 à pousser les jeunes Églises (issues des missions et/ou de la décolonisation) à former des Églises unies et non de multiples Églises confessionnelles. Il est utile de préciser ici qu'en anglais, ecumenical veut dire à la fois œcuménique et universel.

L'auteur utilise la personnalité et les discours de John Mackay, directeur du Conseil missionnaire international puis de l'ARM, comme fil rouge de l'article. Celui-ci a particulièrement plaidé pour la création d'Eglises unies (non-dénominationnelles dans le Sud, pour surmonter les divisions entre réformés dans le Nord). Il était très critique envers le "confessionalisme" qui pour lui minait le mouvement œcuménique qui se développait alors (le COE est créé en 1948). Il réaffirme que "l'ARM est par nature œcuménique" et dénonce la tendance, qu'il pense voir se développer dans la Fédération luthérienne mondiale, de créer une universalité confessionnelle qui fasse l'économie de l'exigence œcuménique, alors que la vraie universalité de l'Eglise étant autant œcuménique qu'elle est géographique.

L'auteur souligne aussi que ce que défend l'ARM est plus une démarche qu'un corpus de doctrine (la référence aux Écritures, la capacité d'évolution des structures ecclésiales grâce au semper reformanda, le fait que l’Église du Christ est une, que l'unité ne dépend pas des structures ecclésiales et que donc c'est lui qui nous donnera l'unité visible), ce qui rend sa posture assez unique parmi les organisations confessionnelles internationales

Il finit en posant la question suivante : l'auto-compréhension supra-confessionnelle de l'ARM est-elle compatible avec l'évolution du mouvement œcuménique qui promeut aujourd'hui la diversité réconciliée et exige donc des organisations confessionnelles d'avoir des positions bien définies, d'être plus "profilées" que ne l'était l'ARM ? 

Claire Sixt Gateuille

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