Une crèche d'Artisanat Sel |
Petite réflexion en ce jour de l'Epiphanie...
J'aime la période de l'Avent, l'attente, la symbolique de la lumière, les textes de promesse tirés d'Esaïe, la chaleur de ces temps partagés dans le culte ou autour de bredele ou d'un vin chaud. J'aime les chants de Noël, dont j'ai réalisé qu'ils agissaient comme une madeleine de Proust à travers les générations, la douceur du récit de l’Évangile de Luc, la simplicité des bergers et de nos assemblées réunies autour de la bonne nouvelle, la chaleur et le plaisir d'être ensemble dont j'ai la chance de bénéficier en famille (je sais que ce n'est pas le cas de toutes les familles...).
L'Avent dure 1 mois. Pour Marie, il a duré bien plus, 9 mois. Notre avent d'un mois est finalement assez masculin, les hommes réalisant souvent seulement au dernier mois de grossesse ce qui va vraiment leur arriver d'ici peu... Mais si l'Avent durait 9 mois chaque année, il n'y aurait plus beaucoup de place pour les autres temps liturgiques !
Noël dure une journée. Souvent même un peu plus, parce qu'on ne peut pas être avec tous en même temps, et que donc les réjouissances s'étalent sur plusieurs jours. Et spirituellement, la naissance de Jésus, ce temps extraordinaire, où le ciel et la terre s'embrassent, où l'inimaginable vient nous rencontrer, où Dieu se fait homme, cette naissance a besoin de quelques jours pour que nous en prenions la mesure. Comme une jeune mère a bien besoin de ses quelques jours à la maternité pour prendre des repères et commencer à connaître son enfant.
Puis vient l'après. Que faisons-nous de ce Jésus tout juste né ? Le remmaillotons-nous pour le ranger avec la crèche jusqu'à l'année prochaine ? Ou apprenons-nous à le connaître, à entrer dans ce mystère plus grand que nous qu'est l'incarnation ? J'aimerais dire "est-ce que nous réalisons la force, la portée de l'incarnation ?", mais pour réaliser, il faut faire rentrer cette idée, ce symbole, cet impensable, dans une structure mentale, dans une conception du monde, dans une compréhension. Or cela risque de limiter l'incarnation, de la rationaliser, de l'enclore dans ce que l'on peut en comprendre...
Carte de Noël de l’Église protestante en Allemagne (EKD) |
Pour les jeunes mères, ce temps de transition des premiers mois est souvent un temps de fragilité, de bousculement intérieur et de doutes, tout autant qu'un temps d'émerveillement et de prise de conscience. Dans les premières semaines après la naissance de ma fille, je dois avouer avoir eu plus d'une fois peur de moi-même, de ma "toute-puissance" face à ce nouveau-né qui me demandait tellement et dépendait tellement de moi... Ce fut le temps de prendre conscience de ma responsabilité... Un temps, aussi, où l'on se sent traversée de forces contradictoires, parfois prise dans des tempêtes intérieures, toujours poussée par ce don de la vie qui vient de nous traverser, désormais consciente de la fragilité de cette vie. Un temps où les gestes les plus simples prennent de l'importance : manger, dormir, se laver (pour le bébé comme pour nous) ; un temps où nous réalisons l'importance de notre corps alors que nous avons souvent tendance le reste du temps à l'oublier ou le traiter comme un accessoire. Un temps où le quotidien revêt une densité nouvelle, est habité de façon nouvelle, prend une valeur nouvelle.
Nous avons toujours tendance à sortir trop vite de Noël. Après l'épiphanie, c'est plié. Dans les paroisses, se profile déjà la semaine de l'unité, dans nos vies la reprise d'un quotidien souvent éreintant, dans nos cœurs, déjà, se dessine la demande de trouver plus de temps pour se ressourcer spirituellement, pour prendre du recul par rapport au flot de nos vies. Nous oublions vite que l'incarnation continue dans tous ces moments et que Dieu vient faire du quotidien un lieu de rencontre et d'apprentissage, le lieu de sa présence dans nos cœurs et nos vies... Nous oublions souvent que Dieu n'est pas à la marge mais au cœur de nos vies, nous qui passons souvent à côté de ce cœur.
Claire Sixt Gateuille
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