A Turin, le 22 juin 2015 |
C'est le titre que le journal protestant italien Riforma a donné à un article sur la lettre que le synode vaudois a adressé au Pape en réponse à sa demande, faite le 22 juin dans le temple de Turin, de pardonner l’Église catholique romaine pour les persécutions envers les vaudois dans les siècles passés.
Dans son discours, le Pape évoquait également l'importance de la collaboration interconfessionnelle, du chemin de communion qui était parcouru en maintes endroits entre membres de l’Église catholique et membres de l’Église vaudoise.
Sa façon d'évoquer l'unité fait écho au concept œcuménique de diversité réconciliée, lorsqu'il dit "L’unité qui est le fruit de l’Esprit saint ne signifie pas uniformité. En effet, les frères sont rassemblés par une même origine, mais ils ne sont pas identiques entre eux. Cela est bien clair dans le Nouveau Testament où tous ceux qui partageaient la même foi en Jésus-Christ étant appelés frères, on a cependant l’intuition que toutes les communautés chrétiennes auxquelles ils appartenaient n’avaient pas le même style, ni une organisation interne identique." Il finit en évoquant l'importance de regarder d'abord ce que nos avons en commun (la foi en Christ et en l'Esprit-Saint) avant les différences, et en traçant des priorités pour la collaboration entre Églises : l'évangélisation, le service (aux plus pauvres, fragiles ou souffrants, et aux migrants).
Dans la lettre du synode vaudois, dont vous pouvez trouver la traduction sur le site de l'EPUdF, celui-ci affirme :
- qu'il accueille la demande de pardon du Pape,
- que seules les victimes, et Dieu, peuvent pardonner, mais que l'Eglise vaudoise a toute confiance en la miséricorde et la grâce de Dieu, qui fait toutes choses nouvelles.
- que toutes les Églises ont besoin du pardon de Dieu et de se convertir pour accomplir sa volonté
- l'importance d'initier une histoire nouvelle de relations entre protestants et catholiques, pour que celles-ci ne soient plus marquées par la division, mais l'écoute mutuelle et la réconciliation. Au passage, la lettre explicite la diversité réconciliée.
Certains médias italiens ont reçu cette lettre comme un refus de pardon. Or l'impossibilité de pardonner se retrouve dans toutes les situations de ce genre (Shoah, etc.). Ce n'est pas un refus puisque la démarche est accueillie et la miséricorde de Dieu évoquée. Et la perspective d'avenir qu'ouvre cette démarche est clairement mise en valeur.
Plus largement, l'évocation de l'écriture d'une histoire nouvelle me semble faire écho à la démarche du document Du Conflit à la communion, qui propose des pistes pour une lecture commune de l'histoire des 500 ans de la Réforme, afin que ces conflits ne mènent pas à des historiographies confessionnelles divergentes et qui perpétueraient ces conflits. Pour faire simple, l'idée est d'essayer de comprendre le point de vue de l'autre, pour ne pas reproduire aujourd'hui l'idée qu'il y a un gentil (forcément de notre bord) et un méchant (forcément de l'autre)...
Bref, ne pas rejouer aujourd'hui des conflits passés, prendre conscience des schémas de pensées qui imprègnent notre façon de raconter l'histoire pour les confronter à celles des autres, et ne pas transmettre aux générations futures un récit partial, une interprétation marquée par le rejet de l'autre. Et dire que l'Eglise vaudoise ne peut pas pardonner à la place des victimes des persécutions, c'est refuser de s'identifier directement à elles, donc refuser d'entrer dans cette lecture biaisée de l'histoire...
Claire Sixt Gateuille
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