vendredi 1 mai 2015

Rencontre des « Ecumenical Officers » à Bossey

Rencontre des ecumenical officers, Bossey (c) Natasha Klukash
Ce mardi 28 avril commençait la réunion des ecumenical officers au Château de Bossey, près de Genève (Suisse), organisée par le conseil œcuménique des Églises (COE). Les ecumenicals officers sont les personnes chargées des relations œcuméniques ou des relations internationales, la plupart des Églises confiant ces deux taches à la même personne. Nous étions donc 40 réunis pendant 4 jours à discuter du thème lancé lors de l’assemblée de Busan : le pèlerinage de justice et de paix, et de l’actualité de nos Églises.

La matinée de mardi a commencé par la présentation des uns et des autres et du programme de la session. Martin Robra, du COE, est venu nous présenter comment celui-ci comprenait le thème du pèlerinage de justice et de paix : Dépasser l’engagement à « rester ensemble » pris à Amsterdam en 1948, pour désormais « avancer ensemble ». La justice et la paix sont articulées à l’unité, l’unité étant elle-même un chemin (unity on the way). L’œcuménisme est donc un processus de transformation, répondant au contexte de notre temps. 

Il existe différentes compréhensions de ce qu’est un pèlerinage. Aussi M. Robra s’est-il appuyé sur la présentation qu’en a fait le Père Ioan Sauca (orthodoxe, directeur de l’institut de Bossey) dans la revue Ecumenical Review : 1. Un cheminement ayant une signification spirituelle et des implications théologiques ; 2. Une unité en chemin, que l’on découvre en marchant ensemble, car la justice et la paix sont des dons de Dieu au monde ; 3. L’horizon du pèlerinage est eschatologique. C’est pourquoi le pèlerinage n’est pas « vers » ou « pour », mais « de » justice et de paix. La justice et la paix ne sont pas « à faire » ou « à conquérir », mais à recevoir. De même, l’unité n’est pas le préliminaire du reste, mais un fruit de ce cheminement.

Château de Bossey (c) Prince Devanandan
Il a fini en présentant les 3 dimensions du cheminement : 1. Festive : célébrer les dons de Dieu, 2. Diaconale et spirituelle : visiter les blessures, et se découvrir faible, 3. Transformatrice : transformer les injustices. Son exposé était entrecoupé de temps de discussion. Il est apparu assez rapidement que le mot "Pèlerinage" était connoté pour de nombreuses Églises (en général protestantes). « Journey », « walk » ou « cheminement » sont des termes plus appropriés, qui ne renvoient ni aux Pilgrim fathers qui, étant arrivés au nouveau monde, l'ont conquis, ni aux superstitions attachées à certains pèlerinages, contre lesquelles les Églises protestantes ont lutté.

Ensuite, Hielke Wolters et le Père Sauca ont présenté comment le COE intègre le « pèlerinage de justice et de paix » dans ses programmes de travail. De façon générale, le COE doit lancer un cercle vertueux comprenant 5 étapes se renforçant les unes les autres : 1. Renforcer la communion (cohésion du groupe) 2. Témoigner ensemble (on prend en compte le contexte qu’on traverse) 3. Encourager la spiritualité, la réflexion et la formation 4. Établir des relations de confiance et de compréhension mutuelle 5. Avoir une communication inspirante et innovante (comment les gens se parlent en chemin).

Après avoir présenté les programmes de travail du COE (organisé selon 3 axes : unité, mission et relations œcuméniques ; témoignage public et diaconie ; formation œcuménique), ils ont présenté quelques exemples de comment ils entrent dans ce pèlerinage (par exemple la formation œcuménique s’adapte aux besoins des personnes formées, ayant développé la connaissance des autres religions car la plupart viennent de pays où le christianisme est minoritaire, mais aussi des façons beaucoup plus concrètes d’aborder la spiritualité pour s’adapter à la demande des pratiquants du Sud). L’institut de Bossey est par exemple un laboratoire de ce cheminement, les gens d’horizons très différents apprenant à vivre ensemble, pouvant « bouger » dans leurs pré-compréhensions des autres car ils font de la recherche (ils ne sont pas dans une posture de représentation ou de défense des positions de leur Eglise). Nous avons entendu aussi que la réduction des moyens financiers à disposition du COE est un défi pour remplir toutes les missions qui lui sont confiées.

"Rapporteuse" d'un groupe (c) André Lavergne
Nous avons fini la journée avec une discussion en groupes, autour de la question « comment nos Églises peuvent se saisir de ce pèlerinage de justice et de paix ? » Certaines Églises ont choisi un axe, pour éviter de se disperser (la justice climatique pour l’Église protestante d’Allemagne, ou la réunification de la péninsule pour les Églises de Corée, etc.). D’autres ne se sont pas encore appropriées ce thème, mais pourraient l’utiliser pour donner plus de visibilité et de cohérence à ce qu’elles font déjà. 

Il a été largement partagé, en tout cas par les représentants des Églises européennes et nord-américaines, que nous n’avons pas besoin d’un programme de plus, à ajouter à nos nombreux programmes, ni une « campagne » comme il y en a déjà beaucoup (si l’on voulait, on pourrait avoir un culte à thème tous les dimanches tellement il y a de journées de ceci ou de cela et de sujets d’actualité). Le pèlerinage de justice et de paix est un cadre, il donne une forme à l’appel œcuménique, aide à articuler le travail pour l’unité et le travail de présence au monde (les anciennes dynamiques de Foi et constitution d’un côté, christianisme pratique [Life and Work] de l’autre). Il peut aider les Eglises à valoriser ce qui se fait déjà, donner aux différentes politiques des Eglises pour l’unité, la justice et la paix une cohérence interne.

Le COE peut aussi être une plateforme d’échange de bonnes pratiques, une source d’inspiration des uns par les autres, un lieu de partage (idées, ressources : matériel pédagogique, liturgique, théologique et biblique, procédures, , etc.) et le centre d’un réseau qui permettrait aux Églises agissant sur telle ou telle préoccupation de savoir ce que les autres font, et développer des coopérations entre Eglises. Cela permettrait peut-être aux membres d’Églises de découvrir plus concrètement l’Eglise universelle, non plus seulement comme quelque chose de spirituel, mais aussi comme l’ensemble des chrétiens en chemin, les uns vers les autres et les uns avec les autres, engagés pour mettre en œuvre dans le monde la justice et la paix qu’ils ont déjà reçu de Dieu.

Claire Sixt Gateuille

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