Baptistère, Cathédrale luthérienne, Riga |
Si vous n'avez pas encore lu l'introduction au thème de l'année 2016 de la semaine de prière pour l'unité, je vous invite à le faire (à télécharger sur le site du COE). La présentation des Églises en Lettonie est intéressante, à la fois par leur diversité, leur témoignage commun et les défis qui se posent à elles.
Ces Eglises ont choisi pour thème les versets 9 et 10 du 2ème chapitre de la première épître de Pierre : "Mais vous, vous êtes
la race élue, la communauté sacerdotale du roi, la nation sainte, le peuple que Dieu s’est acquis,
pour que vous proclamiez les hauts faits
de celui qui vous a appelés des ténèbres à sa merveilleuse lumière,
vous qui jadis n’étiez pas son peuple,
mais qui maintenant êtes le peuple de Dieu ;
vous qui n’aviez pas obtenu miséricorde,
mais qui maintenant avez obtenu miséricorde."
Ce texte n'est pas d'un abord évident, avec ses références au sarcerdoce et à l'élection, qui renvoient à la culture juive ou vétérotestamentaire, et son vocabulaire daté. Pourtant, qui prend le temps de se mettre à l'écoute du texte en verra toute la richesse. Je me méfie toujours de ces textes qui parlent d'élection. Depuis le puritanisme, on a trop vite tendance à en avoir une interprétation triomphaliste ("parce que je le vaux bien !") ou excluante ("je suis élu(e) et pas toi !").
Mais le texte biblique désamorce vite mes craintes : Cette élection, d'abord, n'est pas identitaire, mais missionnaire, vocationnelle. Contrairement à l'appartenance au peuple élu, qui était héritée dans le peuple juif et pouvait donc être revendiquée de façon identitaire (rappelons-nous comment Jean-Baptiste désamorce cette revendication identitaire en Luc 3.8 : "ne commencez pas à dire "Nous avons Abraham pour père !" Car je vous dis que, de ces pierres, Dieu peut susciter des enfants à Abraham"), l'appartenance à ce nouveau peuple de Dieu est donnée dans la foi - donc non acquise - et implique un but. L'élection a eu lieu pour que : "pour que vous proclamiez les hauts faits" de Dieu. L'élection implique une responsabilité, une mission à remplir, c'est un appel autant qu'une élection.Cette élection n'a de sens que rattachée à la responsabilité de témoigner de ce que Dieu a fait et fait dans ce monde, dans notre vie.
Église St Jean (luthérienne) à Riga |
Enfin, il faut lire ce texte biblique dans son contexte, et même doublement : dans le contexte où il a été écrit et dans le contexte qui a amené ces Églises lettones à le choisir. Ce texte est écrit dans un contexte d'adversité, où la communauté chrétienne se retrouve en tension avec la communauté juive dont elle est issue, critiquée pour la place centrale qu'elle donne au Christ et la réinterprétation qu'elle fait des Écritures par le prisme de la vie et de la croix du Christ. C'est une communauté fragilisée que Pierre encourage et valorise en la désignant comme "peuple que Dieu s'est acquis". Et ce texte biblique raisonne aujourd'hui dans nos contextes de sécularisation, de contestation de notre droit à dire notre foi dans l'espace public, de fragilisation de toute parole institutionnelle. Ce texte résonne alors non comme une affirmation triomphaliste, mais comme un encouragement dans notre humilité, une reconnaissance que dans notre fragilité, Dieu vient faire de grandes choses.
Claire Sixt Gateuille
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